samedi 9 mai 2020

SECONDE PARTIE : LES PERSONNAGES CONCEPTUELS



                I - LE GHOURRI ET SA PENSÉE LOGICO-MAGIQUE



Dans ma représentation artistique, apparaît  la figure esthétique  du « Ghourri»;  le primitif, l'homme préhistorique,à travers lequel je m'exprimais. C'est ma puissance d'affect-percept, décrite par Gilles Deleuze dans son livre « Qu'est-ce que la philosophie? (68). Un Déjà-La de mon cheminement vers la philosophie, que je reprend, ici, à nouveaux frais, mais cette fois-ci, comme personnage conceptuel (69).

Dressant donc le décor. Nous sommes dans la préhistoire, quelques parts, sur les hauteurs de l'Atlas, par exemple où dans la savane du Hoggar;  Ghourri, le primitif, fait sa Rencontre Au Monde.
Il est fortement impressionné par toute ce foisonnement d'animaux, de plantes, de mouvements, de cris, de grognements, d'odeurs, de couleurs, de chaleurs, de froids, de vents, de tonnerres, d'éclairs, de pluies, de neiges,  de lumières, et que sais-je encore, à l'infinis. Dans un premier temps, il cherche en primitif qu'il est, à montrer - Monstrer dirait Heidegger - en poussant de faibles grognements, tout en regardant. C'est aussi et en même temps, la phase de la pensée de la main qui s'exprime; un Déjà'Là du déjà-là , où Ghourri n'est plus un animal comme les autres , car quelque chose réfléchit en lui (70); son Image-Conscience se révèle, dans l'imagination en marche.
Ensuite, il tenté de saisir de la main " la chose", afin de la porter à sa bouche, pour la tester, la goûter, la manger, la dévorer, l'assimiler comme force et connaissance. Cependant,  il ne peut pas le faire. Il fait celàjuste  dans l'air, impuissant d' y arrivé.  Frustré, il commence à pousser des " Euh! Euh! " d'étonnement, de déception et de colère. Enfin, il pousse de Son premier besoin, était très probablement, pouvoir saisir la chose, pour l'assimiler. Ne pouvant le faire, il compense sa frustration,  par la puissance de son imaginaire, et ce en créant par la bouche,  une sonorité, une Copie de et par la sonorité, de la chose même. Ensuite de poser cette chose sonore  devant soi,  dans le simple but de s'en saisir magiquement, dans un premier temps, et ce afin de pouvoir s'en emparer plus tard.
grands cris. C'est l'affection au sens spinozien du terme,  d'un  Pré-Parler.
Saisir par la chose sonore, c'est-à-dire par le mot, par le dire, par la Parole; c'est la seconde affection;  celle du Parler. Cette  affection du Parler est celle qui permet de Poser-Pour-Dire et Dire-Pour-Poser ( le Λέγειν - Νοεΐν).
Ghourri passe ainsi, de l'affection du Pré-Parler, à celle du Parler, par la durée de l'Affect (71), en augmentation de puissance. Bien sûr entre les deux affections, il y à cette  durée de l'affect qui prend le temps d'adaptation et de maturation nécessaire qu'il fallût.  
Ce temps est passé, très probablement, par les différents phases, de représentations et d'expressions, dont celles des dessins et peintures de ce que nous appelons, l'art préhistorique, où le Ghourri (72), avait expérimenté le poser-pour-dire et le dire-pour-poser,  à travers ses divers systèmes d'expressions, telles que  les graffitis, par exemple,  les pictogrammes, les dessins, et les peintures, et que sais-je encore par des musiques, des chants, et des danses, afin de s'exprimer; c'est-à-dire Parler sans parler en parlant autrement pour dégager le Parlé du parlant et  Dire les choses dans l'usage d'un langage . Là, entendons nous bien,  nous sommes dans  Le Déjà-Là d'avant toutes langues où langages; à savoir entre le Pré-Parler et le Parler; entre le cri et le premier mot, là où naît la première pensée. Le point initial du Parler/Penser, et de son parlé/pensée.
En posant-pour-dire et en disant-pour-poser, Ghourri fait ÊTRE par le verbe Être, prononcé pour la toute première fois (73). Et c'est là , où  L'Être qui a travers son Déjà-Là  D'Être-étant  ( έόν - έμμεναι ) garde l'Être dans son étant, car L'Être ne peut être qu'en étant.
En faisant Être, il accède à la Topologie de la Pensée (74), par le Don que
lui donne L'Être; à savoir le don, dans un premier temps, de la possibilité de penser.
Soudain et dans le même jour peut être, qui sait, Ghourri assiste impuissant à la mort d'un des siens , dévoré sous ses yeux, par un lion. Ghourri en fût tout bouleversé. Attristé, c'est-à-dire qu'il est entrain d'expérimenter cette fois-ci, un autre affect, celui de l'épreuve de la limite de la vie dans l'horizon de la mort.
Il éprouva un impérieux besoin de gémir, de chantonné, de chantonné en gémissant (75). Des semblants de mots lui viennent spontanément à la Ghourri vient d'expérimenté (76) ainsi, pour la première fois de sa vie,  dans la mort d'un être cher, la limite qui fait l'Autre Déjà-Là, celui du négatif de L'Être, son négatif et son Double; à savoir L'Être-Ténèbre, dont le  Il y a là donc deux faces de L'Être; L'Être-Lumière , à savoir L'Être de la Vie, où L'Être vivant,  auprès de, et en même temps qui, s'éloigne de , ( 78 ) et son double L'Être-Ténèbres;à savoir la face de L'Être susceptible de tournée en pulsion de mort, Le Mourant.
flux tourne en pulsion de mort. Celui-là même qui loge à côté de, auprès de L'Être-Lumière, dans l' έμμεναι grec du fragment de Parmenide (77).

(68) « La différence entre les personnages conceptuels et les figures esthétiques consiste d'abord en ceci: les uns sont des personnages de concepts, les autres, des puissances d'affects et de percepts.» Gilles DELEUZE et Félix GUATTARI :  « Qu'est-ce que la philosophie?» Aux Éditions de Minuit 1991/2005. Page 67.

(69) Idem. Voir le chapitre entier consacré par Gilles Deleuze,  aux personnages conceptuels.

(70) «L'animal est là où il regarde, et son regard ne le réfléchit pas, ni ne réfléchit la chose, mais l'ouvre sur elle.» Maurice BLANCHOT. « L'espace littéraire.» Éditions Gallimard 1955. Page 173.

(71) Voir cours de Gilles DELEUZE sur Spinoza. Séances 6 et 8.
Université de Paris VIII'.

(72)« ...le peintre créait un animal par la peinture, nous de même, nous créons le langage par l'art de nommer où de parler.» PLATON dans «CRATYLE» 424d-425c. Éditions GALLIMARD- FLAMMARION 1967.
« "Voici ton nom", car le nom est sans doute une imitation comme la peinture.» Idem, 430c-431b.

« ...l'art rupestre atlasique et saharien est dans tous les cas un langage et une histoire racontée à travers des gestes esthétiques et techniques accomplis.» Noureddine SAOUDI.  «Les temps préhistoriques en Algérie.» Éditions DALIMEN - 2002. Page 83.

(73) «...l'essence entière du langage se recueille en ce mot singulier ( le verbe Être). Sans lui, tout serait demeuré silencieux, et les hommes, comme certains animaux, auraient bien pu faire usage de leur voix, aucun de ces cris lancés dans la forêt n'aurait jamais noué la grande chaîne du langage.». Michel FOUCAULT, dans son livre « Les mots et les choses.» Éditions Gallimard 1966.  Page 109.


(74)  « Plus le vivant était compliqué, complexe ; plus il se constituait des milieux intérieurs. Plus ces milieux intérieurs étaient forts et structurés, plus ils dépendaient de mécanismes cérébraux et de régulations cérébrales. »
Et
« Le cerveau va mettre en contact un dehors plus profond que tous les mondes extérieurs et un dedans plus profond que les mondes, que les milieux intérieurs. Comment il fait cette mise en contact ? Une mise en contact sans distance du dehors et du dedans...
...Une mise en contact sans distance, ça veut dire quoi ? C'est ce que Simondon explique dans ces pages très belles, ça veut dire, le cerveau a une structure topologique.»
Gilles Deleuze , cours 72 du 11/12/1984, sur Le Cinéma: Image-Pensée. Université Paris VIII.

(75) «La parole donne voix à l'intimité de la mort. Ainsi, il y a une secrète identité entre mourir et chanter.»  Idem,  BLANCHOT. Page 194.

(76) «L'animal qui vit l'Ouvert, est "libre de mort". Mais, nous, dans la mesure où nous subissons la perspective d'une vie bornée et maintenue entre ses bornes, "nous ne voyons que la mort."». Idem, BLANCHOT. Page 191.

(77) Fragment VI de PARMENIDE, longuement commenté par  Martin Heidegger, dans son livre «Qu'appelle-t-on penser?».


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